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L e   c o i n   d e s   a m i s

Stephen Jourdain par François Trojani - page 1 sur 2

A « Espejitos »…

  Que  peut-on  dire  de  ces paradoxes  que  les  mathématiciens eux-mêmes ont le plus grand mal a résoudre, et qui permettent d’énoncer des propriétés opposées à nos attentes, sans toutefois qu’une contradiction apparaisse?

Pour  évoquer  Stephen  Jourdain,  ce  serait  sans  doute une folie que de tenter une comparaison de sa vie avec les théories de Bolzano ou de Cantor, lesquelles concernent la taille «des ensembles infinis» ou  de  «l'infini actuel»  ;  cependant,  et  suivant  mon avis, très peu d’autres approches peuvent rendre compte de ses singularités. En un mot, ou plutôt en une image, «être  contenu  dans»  n'est  pas  «avoir une taille plus petite que». Dès lors, un ensemble A peut être contenu dans un ensemble B alors même que A présente une taille ou un «cardinal», dit-on, égal ou plus grand que B…

Je  laisse  a  chacun  le  soin  de  le  vérifier, mais j'avance l'hypothèse qu'aucune autre théorie ou philosophie que celles de ces «paradoxes» mathématiques, ne permettent de concevoir cette manifestation de «l'infini actuel» que représentait cet Ami et dont il est venu nous entretenir.

Bien que la «logique formelle» ou la situation exacte et le «réel» des «objets quantiques» - dont nous aussi sommes faits, ne l’oublions pas - aient depuis quelques décennies fortement battue en brèche, le «Oui» ou le «Non», la logique formelle et dans d’autres strates ce que nous désignions habituellement comme «Dieu» et «Diable», voire le «bien» et le «moins bien», incontestablement, le  «vide»  et  le  «plein» se conjuguaient dans cet être on ne peux plus paradoxal ou se transmutaient ces oppositums… Beaucoup y ont perdus leurs repères, ou «les pédales» comme  on  dit  plus vulgairement, et comme cet homme échappait a toutes les situations envisageables, plusieurs se sont efforcés et s'efforcent encore de le «comprendre», ou de le réintroduire dans du «connu»…

Au  regard  de  ce  qui  précède,  dire que j’ai rencontré un jour Stephen serait dire une chose manifestement surfaite, inadéquate, voire, d'une banalité telle, qu'elle ne satisferait que mon égo...  Une  autre, tout aussi inappropriée, serait bien évidemment de dire que je ne l'ai pas rencontré… On ne rencontre jamais de tels êtres, on chemine vers ; on ne rencontre jamais que les artefacts intellectuels, les idées et les mots avec lesquels on tente de les conceptualiser ; on les «symbolise» ou on les englue. On ne rencontre ou on ne s'approprie jamais la formule de Euler, les nombres premiers ou un «genre» ; on s'en rapproche infiniment.

Ma  véritable  rencontre  avec  Stephen  Jourdain  a  eu lieu, me semble t-il,  après  que  je  me  sois  quasiment  épuisé  en  cherchant a intégrer et a comparer avec d'autres, mystiques ou philosophes,  ce  qu'il  formulait.  On  ne  «rencontre»  pas une légende,  l'ambiance  d’un  poème,  «l'enchantement» d'un conte de fée ou une aurore. Sans cela, comme pour Aristobulus Ursiclos dans Le rayon vert, on interprète une tempête et éventuellement les larmes, comme une des manifestations du chlorure de sodium.

Ce  qui  s'est  manifesté pour moi un soir à Vizzavona, n'a eu pour équivalence que celle d'un conte de fée, la manifestation d’un moi, aussi dense et pragmatique que celui d'une légende ; absolument  pas  la  statue de marbre blanc de l'éveil, une affirmation ou une reconnaissance de moi par moi ; même pas un constat digne de la moindre des réflexions intellectuelles ou philosophiques. Ce qui m'est apparu et que je tenais, m'a t-il semblé, dans le creux de ma main, n'a pour équivalence que celle d’une poignée de cendres noires, encore incandescentes et de  bois sec.  Je  venais  tout  simplement  de  prendre  feu  et  à  son  tour,  le frêle esquif de ma vie troquait ses voilures contre celles des nuages… Depuis, je ne cesse d'interroger ce «feu naissant et naïf» et la combustion est fort loin d’être terminée. En un mot, je ne suis pas un éveillé.

Celui-là  n'est  pas  «d'ici»,  me  suis-je  dit, il n'appartient  pas à notre monde Euclidien, alors que, attentif, et dans le clair-obscur du salon, je l'écoutais jouer du Jazz au piano. Sous ses apparences  ordinaires  cet  homme  est  extrêmement  dangereux,  «il  a  du  traverser  et éradiquer l'abîme», me clamait dans l'ombre, le fond «noir, plus noir que le noir» du tableau en trompe l'oeil de ma vie, pendant que s'écaillait, un lambeau de pigment après l'autre, le beau paysage que j'avais eut tant de mal a peindre…

S'il s'agit d'une expérience, telle a été la mienne ; et comme elle n'est en rien glorieuse et que j'ai rarement entendu relaté ou noté, même en marge, ce préalable pouvoir de déconstruction dont il était le vecteur, je me dois de la formuler.
                                                                                                                                                                                                                                                                                               lire la suite p.2----->